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Mozambique: les jihadistes sèment la panique, tactique avant le retour de TotalEnergies?
Mozambique: les jihadistes sèment la panique, tactique avant le retour de TotalEnergies? / Photo: Camille LAFFONT - AFP/Archives

Mozambique: les jihadistes sèment la panique, tactique avant le retour de TotalEnergies?

Avant la reprise annoncée imminente du projet gazier de TotalEnergies dans le nord du Mozambique, le groupe affilié à l'organisation Etat islamique qui mène depuis 2017 une insurrection dans cette région du pays d'Afrique australe a lancé des raids ayant causé des déplacements massifs de population ces dernières semaines.

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- Un déplacement d'une rare ampleur

Les jihadistes ont revendiqué sept attaques fin juillet dans le sud de la province du Cabo Delgado, dont une première lors de laquelle ils ont exécuté six villageois.

Près de 59.000 personnes déplacées ont été recensées rien qu'autour de la petite localité de Chiure, indique à l'AFP le chef de mission de Médecins sans frontières au Mozambique Sebastian Traficante, contacté par téléphone.

La région n'avait plus connu une telle vague de déplacements depuis février 2024, d'après des statistiques de l'ONU.

Depuis le camp de transit de cette localité, M. Traficante décrit une "taille des installations insuffisante" pour accueillir dans un premier temps cet afflux "inattendu" et "massif" de personnes arrivées à pied.

"Certaines personnes ont même dormi à la belle étoile, il n'y avait pas d'endroit servant de toilettes et évidemment pas de nourriture disponible", raconte le chef de mission de MSF.

Dans le chaos, "des familles ont été séparées et ont perdu parfois leurs enfants".

"Une partie des déplacés sont arrivés plus tardivement parce qu'ils se sont retrouvés piégés entre deux endroits, relate Sebastian Traficante. Ils ont dormi dans la brousse jusqu'à ce que la sécurité soit suffisante pour marcher jusqu'à Chiure, d'après eux."

- Une zone moins protégée

Les insurgés mènent d'ordinaire leurs attaques une centaine de kilomètres plus au nord. "Les terroristes ont quitté leurs bases près de Macomia d'où ils se sont séparés en plusieurs groupes", explique à l'AFP sous couvert d'anonymat une source sécuritaire au Cabo Delgado.

"Ils ont profité d'une faible présence sécuritaire autour de Chiure pour mener des raids et piller plusieurs villages", ajoute-t-elle.

Les forces mozambicaines aussi bien que l'armée rwandaise - qui intervient en renfort depuis juillet 2021 - sont concentrées dans des districts septentrionaux, théâtres d'opérations plus habituels mais aussi plus proches du projet gazier du groupe français TotalEnergies près de Palma.

A tel point que les assaillants sont restés une dizaine de jours près de Chiure, d'après Peter Bofin, analyste de l'insurrection au Cabo Delgado pour l'ONG Acled recensant des données sur les conflits dans le monde.

"Ils y étaient au moins du 24 juillet jusqu'à l'arrivée de renforts de l'armée le 3 août, affirme-t-il à l'AFP. Entre temps, ils n'ont rencontré aucune force étatique, que ce soit la police ou l'armée."

Mieux équipées et organisées, les troupes rwandaises disposent d'une base à une cinquantaine de kilomètres au nord, près d'Ancuabe, mais ne sont pas intervenues.

- Une stratégie pour étirer

Cette offensive des jihadistes ne signifie pas un abandon de leurs positions au nord. "Ils sont encore là-bas", explique Peter Bofin. "C'est une action plutôt tactique et, selon nous, une tentative visant à étirer les forces mozambicaines voire rwandaises. En les étirant, il devient plus difficile de protéger le nord."

Les mouvements dans le district de Chiure, comme en février ou en avril 2024, causent aussi plus de panique et de déplacements de population que dans le nord, où la plupart des habitants sont partis, sans revenir, depuis longtemps.

"C'est ce qu'ils cherchent à provoquer", estime Peter Bofin. "Il y a quelques années dans son magazine hebdomadaire Al-Naba, l'Etat islamique écrivait que le meurtre d'un chrétien dans un village inciterait les habitants des villages environnants à fuir et mettrait les villes alentours sous pression. Ils l'ont dit noir sur blanc."

- Un effet TotalEnergies?

La reprise du projet gazier géant de TotalEnergies à Afungi est prévue d'ici la fin de l'été européen (hiver austral), d'après sa direction. L'attaque de la ville voisine de Palma en mars 2021, ayant fait plus de 800 morts dont des sous-traitants d'après l'Acled, avait provoqué son interruption.

D'un investissement de 20 milliards de dollars, il doit participer - avec un autre projet conduit par l'américain ExxonMobil - à faire du Mozambique un des dix premiers producteurs mondiaux de gaz, d'après le cabinet Deloitte.

Ces dernières semaines, l'offensive des insurgés vers le sud et vers Chiure s'est accompagnée "d'une campagne de propagande assez intense menée par l'Etat islamique", relate Peter Bofin, avec une pleine page consacrée au Mozambique dans son magazine ces dernières semaines.

"Il est difficile de ne pas faire le lien avec la situation concernant l'usine de gaz naturel liquéfié", juge-t-il. "Ils savent également à quel point cette période est sensible."

F.Tsakiris--AN-GR